Retour sur le projet de production de la Clio 4 a Bursa, en Turquie. Et pourquoi cela annonce un mouvement bien plus vaste de depart de l’industrie de la France, voir de l’Europe occidental.
Il y a une quinzaine de jours, le quotidien Les echos pretendait savoir que Renault allait produire la quasi-integralite des Clio 4 en Turquie. Le site de Flins (ou sont actuellement produites l’essentiel des Clio 3) ne gererait plus que le reliquat.
La rumeur fit un tolle.
Renault, pour beaucoup de Francais, ce n’est pas qu’une grande entreprise Francaise ou une ancienne entreprise publique ou l’etat reste le premier actionnaire.
Renault c’est, depuis un siecle, un acteur majeur de l’industrie, de l’economie et de la politique hexagonale. La firme au losange fait parti de l’histoire de France contemporaine. D’ailleurs, elle n’hesite pas a faire regulierement vibrer cette corde sentimentalo-patriotique dans ses publicites. En consequence, beaucoup de gens en sont restes a l’epoque de la R.N.U.R.
Une quinzaine de jours de denegations, de gesticulations politico-mediatiques (ou mediatico-politiques) et de “convocation” de Carlos Ghosn plus tard, un accord etait trouve. Ainsi, Renault produira l’essentiel des Clio 4 a Bursa et un reliquat sera produit a Flins. En bref, une belle tartufferie.
Mais, nous dit-on, que les employes de Flins se rassurent, car le site se specialisera dans les voitures electriques.
Un lecteur du Blog Auto avait, avec cynisme, mis cela en parallele avec le discours de Renault de la fin des annees 90. L’Espace 4 serait produit a Sandouville. Mais, nous disait-on, que les employes de Matra Automobile se rassurent, car le site de Romorantin allait se specialiser dans les voitures innovantes…
Cette usine est revenue tristement dans l’actualite a l’automne dernier, lorsqu’elle fut definitivement rasee:
Il ne faut pas confondre “delocalisation” et “mondialisation”. Comme d’autres constructeurs, Renault doit se rapprocher de sa clientele.
Par exemple, l’usine Renault-Mahindra de Nashik, en Inde (ci-dessous) ne sert qu’a approvisionner le marche Indien.
Et si la Logan est produite en Roumanie, c’est parce qu’a l’origine, elle n’etait destinee qu’a l’Europe Orientale.
Le souci, c’est que ces dernieres annees Renault a lourdement investi dans ses sites de Pitesti (Dacia; Roumanie), Bursa (Renault-Oyak; Turquie) et Busan (Renault-Samsung; Coree du Sud.) Alors qu’a contrario, peu de travaux ont ete fait sur les sites de Flins, Maubeuge ou Sandouville.
Lorsque Pitesti ne peut plus faire face a la demande en Logan, Renault fait transformer son usine Marocaine. Samsung-Renault ne peut produire toutes les SM3/Fluence? Alors c’est a Bursa que l’on produira les Fluence “Europeennes”.
Le seul cas de relocalisation fut la Clio Campus, rapatriee a Flins pour liberer de l’espace pour la Twingo 2 sur sa chaine Slovene. Et encore, la Commission Europeenne tapa sur les doigts de la firme au losange.
On peut etre pessimiste sur l’avenir des usines Francaises de Renault.
Bursa produit aujourd’hui des Clio 3 pour le marche local (et l’ensemble des Clio Estate.) Pour la Clio 4, il fournira cette fois l’ensemble de l’Europe. Le site possede le savoir-faire necessaire et le regroupement permet des economies d’echelle.
Or, Bursa produit egalement des Megane 3 pour le marche local (ainsi que l’ensemble des Fluence.) Si on suit la meme logique, on pourrait tres bien imaginer qu’il recupere toutes les Megane 4.
Busan va bientot produire la SM5 (future Laguna 3 4 portes) et la SM7 (future Safrane.) Les Koleos (alias QM5) proviennent deja de la-bas.
La encore, pour la Laguna 4, sachant que Sandouville est loin de son point d’equilibre, Renault pourrait decider de tout regrouper a Busan.
Qui plus est, la Twingo 2 est deja produite en Slovenie et que le Kangoo 2 n’arriva qu’in extremis a Maubeuge (le Kangoo 3 ne devrait pas avoir cette chance.) Quant a l’Espace, son futur est tres incertain.
Ainsi, il ne resterait plus beaucoup de Renault “made in France”. Ces images appartiendraient a un passe de plus en plus lointain…
Pourra-t-on encore considerer Renault comme une marque Francaise?
Est-ce que le fait que tous les modeles (y compris ceux de Dacia et Renault-Samsung) soient concus en France est suffisant?
Revenons au present. L’affaire de la delocalisation de la Clio 4 en Turquie n’est que le sommet de l’iceberg.
Aujourd’hui, les constructeurs sous-traitent largement. Ils ne gerent plus que l’assemblage final et la fabrication de moteurs. Ainsi, ils ne representent plus qu’une part minoritaire des emplois du secteur automobile.
Les equipementiers de rang 1 sont au chœur des delocalisations. Ils ont tendance a se rapprocher des usines des constructeurs, voir a s’installer carrement dans leurs sites.
Donc, si Renault (et PSA fait presque de meme) quitte la France, Bosch, Michelin, Valeo, etc. vont devoir egalement partir.
Le cas des logisticiens est egalement tres peu evoque. La logistique externe, ce n’est pas que livrer des palettes de pieces et mettre des voitures sur un camion!
Desormais, certains gros transporteurs doivent gerer eux-memes les approvisionnements en pieces des sites et les niveaux de stocks. Ils prennent egalement en charge les voitures a la sortie de l’usine et ils s’occupent tout seul de la repartition par concessionnaires.
La encore, si le constructeur ferme un site, le prestataire logistique doit partir.
Renault qui licencierait x personnes, cela fait les gros titres. Alors que Gefco ou Norbert Dentressangle qui licencierait x personnes, c’est une simple breves dans la presse specialisee. Et c’est aussi pour cela que les constructeurs sous-traitent.
Enfin, il y a le cas des equipementiers de rang 2 ou 3. Hier, sur Radio Classique, l’economiste Elie Cohen defendait la delocalisation de la Clio 4, afin que Renault puisse resister demain a l’invasion des voitures Chinoises ou Indiennes. Sauf qu’elles sont deja la… Mais en pieces detachees!
Les ventes de voitures Chinoises en Europe sont pour l’instant marginales. En revanche, les entreprises Chinoises fabriquent deja quantites de pieces tres basiques que l’on retrouve sur nos voitures.
Les constructeurs imposent a leurs fournisseurs de tirer les prix vers le bas. Pour faire des economies, les equipementiers font donc appel a des fournisseurs venus de pays low-cost. Cela se fait au detriment de petites PME et ces dernieres ferment dans un anonymat relatif.
En resume, le probleme va donc bien au-dela de la question de la production ou non de la Clio 4 a Bursa.
A lire egalement:
Renault, Renault, Renault!
Les coupes de Renault
“Le segment des SUV est trop etroit pour que Renault l’investisse”

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Renault et les delocalisations

Retour sur le projet de production de la Clio 4 a Bursa, en Turquie. Et pourquoi cela annonce un mouvement bien plus vaste de depart de l’industrie de la France, voir de l’Europe occidental.
Il y a une quinzaine de jours, le quotidien Les echos pretendait savoir que Renault allait produire la quasi-integralite des Clio 4 en Turquie. Le site de Flins (ou sont actuellement produites l’essentiel des Clio 3) ne gererait plus que le reliquat.
La rumeur fit un tolle.
Renault, pour beaucoup de Francais, ce n’est pas qu’une grande entreprise Francaise ou une ancienne entreprise publique ou l’etat reste le premier actionnaire.
Renault c’est, depuis un siecle, un acteur majeur de l’industrie, de l’economie et de la politique hexagonale. La firme au losange fait parti de l’histoire de France contemporaine. D’ailleurs, elle n’hesite pas a faire regulierement vibrer cette corde sentimentalo-patriotique dans ses publicites. En consequence, beaucoup de gens en sont restes a l’epoque de la R.N.U.R.
Une quinzaine de jours de denegations, de gesticulations politico-mediatiques (ou mediatico-politiques) et de “convocation” de Carlos Ghosn plus tard, un accord etait trouve. Ainsi, Renault produira l’essentiel des Clio 4 a Bursa et un reliquat sera produit a Flins. En bref, une belle tartufferie.
Mais, nous dit-on, que les employes de Flins se rassurent, car le site se specialisera dans les voitures electriques.
Un lecteur du Blog Auto avait, avec cynisme, mis cela en parallele avec le discours de Renault de la fin des annees 90. L’Espace 4 serait produit a Sandouville. Mais, nous disait-on, que les employes de Matra Automobile se rassurent, car le site de Romorantin allait se specialiser dans les voitures innovantes…
Cette usine est revenue tristement dans l’actualite a l’automne dernier, lorsqu’elle fut definitivement rasee:
Il ne faut pas confondre “delocalisation” et “mondialisation”. Comme d’autres constructeurs, Renault doit se rapprocher de sa clientele.
Par exemple, l’usine Renault-Mahindra de Nashik, en Inde (ci-dessous) ne sert qu’a approvisionner le marche Indien.
Et si la Logan est produite en Roumanie, c’est parce qu’a l’origine, elle n’etait destinee qu’a l’Europe Orientale.
Le souci, c’est que ces dernieres annees Renault a lourdement investi dans ses sites de Pitesti (Dacia; Roumanie), Bursa (Renault-Oyak; Turquie) et Busan (Renault-Samsung; Coree du Sud.) Alors qu’a contrario, peu de travaux ont ete fait sur les sites de Flins, Maubeuge ou Sandouville.
Lorsque Pitesti ne peut plus faire face a la demande en Logan, Renault fait transformer son usine Marocaine. Samsung-Renault ne peut produire toutes les SM3/Fluence? Alors c’est a Bursa que l’on produira les Fluence “Europeennes”.
Le seul cas de relocalisation fut la Clio Campus, rapatriee a Flins pour liberer de l’espace pour la Twingo 2 sur sa chaine Slovene. Et encore, la Commission Europeenne tapa sur les doigts de la firme au losange.
On peut etre pessimiste sur l’avenir des usines Francaises de Renault.
Bursa produit aujourd’hui des Clio 3 pour le marche local (et l’ensemble des Clio Estate.) Pour la Clio 4, il fournira cette fois l’ensemble de l’Europe. Le site possede le savoir-faire necessaire et le regroupement permet des economies d’echelle.
Or, Bursa produit egalement des Megane 3 pour le marche local (ainsi que l’ensemble des Fluence.) Si on suit la meme logique, on pourrait tres bien imaginer qu’il recupere toutes les Megane 4.
Busan va bientot produire la SM5 (future Laguna 3 4 portes) et la SM7 (future Safrane.) Les Koleos (alias QM5) proviennent deja de la-bas.
La encore, pour la Laguna 4, sachant que Sandouville est loin de son point d’equilibre, Renault pourrait decider de tout regrouper a Busan.
Qui plus est, la Twingo 2 est deja produite en Slovenie et que le Kangoo 2 n’arriva qu’in extremis a Maubeuge (le Kangoo 3 ne devrait pas avoir cette chance.) Quant a l’Espace, son futur est tres incertain.
Ainsi, il ne resterait plus beaucoup de Renault “made in France”. Ces images appartiendraient a un passe de plus en plus lointain…
Pourra-t-on encore considerer Renault comme une marque Francaise?
Est-ce que le fait que tous les modeles (y compris ceux de Dacia et Renault-Samsung) soient concus en France est suffisant?
Revenons au present. L’affaire de la delocalisation de la Clio 4 en Turquie n’est que le sommet de l’iceberg.
Aujourd’hui, les constructeurs sous-traitent largement. Ils ne gerent plus que l’assemblage final et la fabrication de moteurs. Ainsi, ils ne representent plus qu’une part minoritaire des emplois du secteur automobile.
Les equipementiers de rang 1 sont au chœur des delocalisations. Ils ont tendance a se rapprocher des usines des constructeurs, voir a s’installer carrement dans leurs sites.
Donc, si Renault (et PSA fait presque de meme) quitte la France, Bosch, Michelin, Valeo, etc. vont devoir egalement partir.
Le cas des logisticiens est egalement tres peu evoque. La logistique externe, ce n’est pas que livrer des palettes de pieces et mettre des voitures sur un camion!
Desormais, certains gros transporteurs doivent gerer eux-memes les approvisionnements en pieces des sites et les niveaux de stocks. Ils prennent egalement en charge les voitures a la sortie de l’usine et ils s’occupent tout seul de la repartition par concessionnaires.
La encore, si le constructeur ferme un site, le prestataire logistique doit partir.
Renault qui licencierait x personnes, cela fait les gros titres. Alors que Gefco ou Norbert Dentressangle qui licencierait x personnes, c’est une simple breves dans la presse specialisee. Et c’est aussi pour cela que les constructeurs sous-traitent.
Enfin, il y a le cas des equipementiers de rang 2 ou 3. Hier, sur Radio Classique, l’economiste Elie Cohen defendait la delocalisation de la Clio 4, afin que Renault puisse resister demain a l’invasion des voitures Chinoises ou Indiennes. Sauf qu’elles sont deja la… Mais en pieces detachees!
Les ventes de voitures Chinoises en Europe sont pour l’instant marginales. En revanche, les entreprises Chinoises fabriquent deja quantites de pieces tres basiques que l’on retrouve sur nos voitures.
Les constructeurs imposent a leurs fournisseurs de tirer les prix vers le bas. Pour faire des economies, les equipementiers font donc appel a des fournisseurs venus de pays low-cost. Cela se fait au detriment de petites PME et ces dernieres ferment dans un anonymat relatif.
En resume, le probleme va donc bien au-dela de la question de la production ou non de la Clio 4 a Bursa.
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Postat de pe data de 31 dec., 2009 in categoria România în lume. Poti urmari comentariile acestui articol prin RSS 2.0. Acest articol a fost vizualizat de 495 ori.

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