Roms, gens du voyage, deux réalités différentes
Nicolas Sarkozy a annoncé une réunion sur « les gens du voyage et les Roms ». Le premier terme est administratif et non ethnique. Quant au second, il recouvre des catégories de population très diverses
Le Pèlerinage des Saintes-Maries-de-la-Mer auquel participent chaque année des milliers de Gitans (AFP/Gérard Julien).
Cinq jours après le drame de Saint-Aignan, l’annonce par le chef de l’État d’une réunion à l’Élysée le 28 juillet sur les « problèmes que posent les comportements de certains parmi les gens du voyage et les Roms » a suscité de vives critiques dans le monde politique et associatif. L’Élysée semble inclure dans un même ensemble des populations fort différentes. Explication.
Le chef de l’État annonce qu’il « décidera les expulsions de tous les campements en situation irrégulière ». Il vise d’abord les Roms de Bulgarie et de Roumanie qui, depuis l’intégration de ces deux pays à l’Union européenne en 2007, sont nombreux à fuir les discriminations et à chercher du travail. Ils seraient environ 10 000 à 15 000 sur le territoire national, principalement en région parisienne.
Selon la loi, ces familles – qui s’entassent dans des bidonvilles, vivent de la mendicité ou de petits boulots – ne sont expulsables que si elles troublent l’ordre public et ne disposent pas de ressources suffisantes pour rester en France plus de trois mois. Sédentaires dans leur pays d’origine, ces Roms n’ont pas la nationalité française et, le plus souvent, ne parlent pas le français.Les Roms sont présents en France depuis cinq siècles Ce n’est bien évidemment pas le cas des Roms installés en France depuis des générations. Selon leurs origines (Espagne, Italie, Europe de l’Est…), on les appelle Tsiganes, Gitans, Manouches ou Yéniches. Les premiers se sont installés en France dès le XVIe siècle.
Ces Roms sont français et beaucoup d’entre eux se sont sédentarisés. D’où l’indignation de Jérôme Weinhard qui entend, depuis cinq jours, les journalistes ou les politiques parler indifféremment de Roms ou de gens du voyage. Responsable de la section juridique au sein de la Fédération nationale des gens du voyage (Fnasat), il explique que ce terme est en fait une appellation strictement « administrative », sans aucune référence « ethnique ».
Il faut remonter au XIXe siècle pour voir apparaître le concept de gens du voyage. À l’époque, l’administration doit gérer les migrations intérieures. Elle crée une carte de « saltimbanques » pour tous ceux qui exercent une activité professionnelle ambulante. Mais sur les routes de France, on croise aussi toute une variété de migrants : des anciens soldats de Napoléon, des familles qui ont fui la misère de leur région et… les Roms.
En 1912, la loi introduit le statut de « forain » et un « carnet nomade » avec signalement anthropométrique : doubles photos d’identité, empreintes digitales, mensurations. L’utilisation de ces documents pendant l’Occupation pour interner les Tsiganes poussera le législateur à supprimer le signalement anthropométrique. La loi de 1969 crée un titre de circulation et introduit le terme générique de « gens du voyage. »Beaucoup de gens du voyage n’ont pas de racines tsiganes Ainsi, si beaucoup de Roms se sont sédentarisés, ceux qu’on appelle les gens du voyage sont très souvent des familles qui n’ont aucune racine tsigane. Dans l’affaire de Saint-Aignan, la famille de la jeune victime, Luigi Duquenet, est originaire du Loir-et-Cher où ses aïeux habitaient avant d’épouser la vie nomade.
« Le terme Roms renvoie à une notion ethnique, celui de gens du voyage est purement administratif », insiste Jérôme Weinhard. « Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que beaucoup de grandes familles de gens du voyage ont des racines régionales très anciennes. Certaines, d’origine plutôt rurale, se déplacent à l’intérieur d’une même région. D’autres, aux origines plus urbaines, ont plus de moyens, se déplacent moins souvent mais vont plus loin. »
Combien sont, respectivement, les Roms et les gens du voyage ? L’interdiction de statistiques ethniques empêche de donner un chiffre précis des Roms français, mais on cite souvent le nombre de 350 000 personnes. Pour les gens du voyage, l’administration recensait 160 000 titres de circulation en 2006, délivrés aux personnes âgées de 16 à 80 ans. Parmi les gens du voyage, certains ont choisi d’acheter un terrain familial où ils garent leurs caravanes autour d’un local en dur (autorisé depuis la loi Besson de 1990).
Mais Jérôme Weinhard conteste le terme de sédentarisation qui est employé, comme dans le cas de la famille Duquenet. « On peut dire qu’on se sédentarise quand on vend sa caravane pour prendre un logement ordinaire. Mais, même quand on achète un terrain, on reste un nomade. Les situations de ces familles sont très diverses, il ne faut surtout pas croire que les gens du voyage forment une communauté homogène. »

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Roms, gens du voyage, deux réalités différentes
Nicolas Sarkozy a annoncé une réunion sur « les gens du voyage et les Roms ». Le premier terme est administratif et non ethnique. Quant au second, il recouvre des catégories de population très diverses
Le Pèlerinage des Saintes-Maries-de-la-Mer auquel participent chaque année des milliers de Gitans (AFP/Gérard Julien).
Cinq jours après le drame de Saint-Aignan, l’annonce par le chef de l’État d’une réunion à l’Élysée le 28 juillet sur les « problèmes que posent les comportements de certains parmi les gens du voyage et les Roms » a suscité de vives critiques dans le monde politique et associatif. L’Élysée semble inclure dans un même ensemble des populations fort différentes. Explication.
Le chef de l’État annonce qu’il « décidera les expulsions de tous les campements en situation irrégulière ». Il vise d’abord les Roms de Bulgarie et de Roumanie qui, depuis l’intégration de ces deux pays à l’Union européenne en 2007, sont nombreux à fuir les discriminations et à chercher du travail. Ils seraient environ 10 000 à 15 000 sur le territoire national, principalement en région parisienne.
Selon la loi, ces familles – qui s’entassent dans des bidonvilles, vivent de la mendicité ou de petits boulots – ne sont expulsables que si elles troublent l’ordre public et ne disposent pas de ressources suffisantes pour rester en France plus de trois mois. Sédentaires dans leur pays d’origine, ces Roms n’ont pas la nationalité française et, le plus souvent, ne parlent pas le français.Les Roms sont présents en France depuis cinq siècles Ce n’est bien évidemment pas le cas des Roms installés en France depuis des générations. Selon leurs origines (Espagne, Italie, Europe de l’Est…), on les appelle Tsiganes, Gitans, Manouches ou Yéniches. Les premiers se sont installés en France dès le XVIe siècle.
Ces Roms sont français et beaucoup d’entre eux se sont sédentarisés. D’où l’indignation de Jérôme Weinhard qui entend, depuis cinq jours, les journalistes ou les politiques parler indifféremment de Roms ou de gens du voyage. Responsable de la section juridique au sein de la Fédération nationale des gens du voyage (Fnasat), il explique que ce terme est en fait une appellation strictement « administrative », sans aucune référence « ethnique ».
Il faut remonter au XIXe siècle pour voir apparaître le concept de gens du voyage. À l’époque, l’administration doit gérer les migrations intérieures. Elle crée une carte de « saltimbanques » pour tous ceux qui exercent une activité professionnelle ambulante. Mais sur les routes de France, on croise aussi toute une variété de migrants : des anciens soldats de Napoléon, des familles qui ont fui la misère de leur région et… les Roms.
En 1912, la loi introduit le statut de « forain » et un « carnet nomade » avec signalement anthropométrique : doubles photos d’identité, empreintes digitales, mensurations. L’utilisation de ces documents pendant l’Occupation pour interner les Tsiganes poussera le législateur à supprimer le signalement anthropométrique. La loi de 1969 crée un titre de circulation et introduit le terme générique de « gens du voyage. »Beaucoup de gens du voyage n’ont pas de racines tsiganes Ainsi, si beaucoup de Roms se sont sédentarisés, ceux qu’on appelle les gens du voyage sont très souvent des familles qui n’ont aucune racine tsigane. Dans l’affaire de Saint-Aignan, la famille de la jeune victime, Luigi Duquenet, est originaire du Loir-et-Cher où ses aïeux habitaient avant d’épouser la vie nomade.
« Le terme Roms renvoie à une notion ethnique, celui de gens du voyage est purement administratif », insiste Jérôme Weinhard. « Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que beaucoup de grandes familles de gens du voyage ont des racines régionales très anciennes. Certaines, d’origine plutôt rurale, se déplacent à l’intérieur d’une même région. D’autres, aux origines plus urbaines, ont plus de moyens, se déplacent moins souvent mais vont plus loin. »
Combien sont, respectivement, les Roms et les gens du voyage ? L’interdiction de statistiques ethniques empêche de donner un chiffre précis des Roms français, mais on cite souvent le nombre de 350 000 personnes. Pour les gens du voyage, l’administration recensait 160 000 titres de circulation en 2006, délivrés aux personnes âgées de 16 à 80 ans. Parmi les gens du voyage, certains ont choisi d’acheter un terrain familial où ils garent leurs caravanes autour d’un local en dur (autorisé depuis la loi Besson de 1990).
Mais Jérôme Weinhard conteste le terme de sédentarisation qui est employé, comme dans le cas de la famille Duquenet. « On peut dire qu’on se sédentarise quand on vend sa caravane pour prendre un logement ordinaire. Mais, même quand on achète un terrain, on reste un nomade. Les situations de ces familles sont très diverses, il ne faut surtout pas croire que les gens du voyage forment une communauté homogène. »

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Postat de pe data de 23 iul., 2010 in categoria România în lume. Poti urmari comentariile acestui articol prin RSS 2.0. Acest articol a fost vizualizat de 612 ori.

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